Cette chronique concerne l’une des fermes auvergnate gérée par le mouvement Terre de Liens dont les objectifs sont d’enrayer la disparition des terres agricoles, alléger le parcours des agriculteurs qui cherchent à s’installer, et développer l’agriculture biologique et paysanne.

21/01/2020 Ferme des Raux ; Gerzat (63). Dans la chronique « Le bonheur dans une éteule de maïs » j’ai décrit la riche flore adventice observée sur une vaste parcelle de la ferme gérée en bio et occupée par une éteule de maïs. Or, tout en faisant le relevé botanique, j’y ai levé une belle troupe d’alouettes des champs : au moins 150 individus, soit un effectif conséquent pour cette espèce en fort déclin au niveau de ses populations hivernantes.

Quelques unes des alouettes levées dans l’éteule de maïs

Dans l’Atlas des oiseaux de France (2), on nous dit que « L’aire de répartition hivernale se réduit et se morcelle depuis les années 70-80 ; plusieurs régions dont l’Auvergne semblent avoir perdu une partie de leurs effectifs hivernaux ».  Une hypothèse, corroborée par études anglaises, est avancée : « L’accroissement des cultures de céréales d’hiver au détriment de celles de printemps pourrait jouer un rôle significatif dans le déclin des hivernantes. » Autrement dit, l’alouette des champs manquerait cruellement de chaumes ou éteules pour se nourrir en hiver. 

Une étude conduite en France (3) apporte un éclairage intéressant sur les causes de cette dépendance. L’analyse des contenus de gésiers (l’alouette est une espèce qui se chasse !!) récoltés sur des alouettes hivernantes dans l’ouest de la France confirme le régime granivore de cet oiseau en hiver : des graines de 38 espèces réparties dans 16 familles de plantes ont été identifiées. Toutes sauf une appartenaient à des mauvaises herbes ou adventices ; contrairement à une croyance tenace, les alouettes ne consomment donc pas des grains de blé glanés en hiver ! Chaque oiseau peut consommer de 4200 à 5600 graines par jour (soit une masse de 8 grammes). 

Colonies d’adventices (ici du mouron des oiseaux) qui témoignent de l’abondante banque de graines du sol

Ainsi s’illumine la présence de cette belle troupe aux Raux ; avec ce cortège diversifié d’adventices (voir la chronique) permis par la gestion en bio, le sol doit renfermer une belle provision de graines capable de nourrir de tels effectifs. En plus, elles participent ainsi à la régulation de ce stock semencier qui, ne l’oublions pas, cause bien des soucis aux agriculteurs quand elles germent massivement après la mise en culture ! 

G. Guillot. Zoom-nature. 

Bibliographie 

1) https://terredeliens.org/auvergne.html

2) l’Atlas des oiseaux de France métropolitaine (vol. 2). N. Issa ; Y. Muller. Ed. delachaux et niestlé. 2015 

3) Weed seeds, not grain, contribute to the diet of wintering skylarks in arable farmlands of Western France. Cyril Eraud et al. Eur J Wildl Res (2015) 61:151–161