Muscari comosum

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Touffe fleurie de muscari à toupet.

Quand on lit les textes naturalistes des anciens Grecs ou romains, on est souvent perplexe devant la diversité des informations fournies dont beaucoup semblent complètement farfelues ou invraisemblables ; on finit donc par considérer que tous leurs écrits ne sont que des élucubrations qui ne faisaient en aucun cas appel au sens de l’observation, la signature du vrai naturaliste. Et pourtant, divers exemples viennent tempérer ce premier jugement trop sommaire dont celui de Théophraste et du muscari à toupet.Originaire de l’île de Lesbos, Théophraste (371- 287 avant JC) poursuivit les travaux d’Aristote dans le domaine de l’histoire naturelle et notamment en botanique ; il a laissé à ce propos deux traités fondamentaux qui, des siècles plus tard, vont largement influencer les sciences à la Renaissance : Historia Plantarum et De Causis Plantarum.

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Buste de Théophraste.

Un détail surprenant à propos des graines du muscari à toupet

Dans ces deux ouvrages, il mentionne à plusieurs reprises une plante nommée « bulbes » et dont la description semble bien correspondre au muscari à toupet : il parle notamment des gros bulbes comestibles de cette plante (toujours consommés actuellement en Méditerranée) et des méthodes pour faire grossir les bulbes. Mais il ajoute surtout un curieux détail inattendu : « toutes les graines produites ensemble ne germent pas toutes mais certaines le font la première année et d’autres la seconde année » ; autrement dit, la germination d’une cohorte de graines s’étale sur deux ans.Or, des études menées en région méditerranéenne confirment complètement cette observation très naturaliste ce qui permet en retour de valider l’identité du « bulbe » comme étant bien le muscari à toupet.

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Bulbe de muscari à toupet.

Des conditions de germination bien méditerranéennes

Une équipe grecque (1) a mené une série d’expériences pour déterminer les conditions de germination de plusieurs espèces de Muscaris dont le muscari à toupet. Ils ont mis en évidence l’absence de dormance primaire, i.e. qu’il n’y a pas besoin de l’intervention d’agents externes tels que le froid ou des attaques microbiennes pour induire la germination ; si on gratte artificiellement l’enveloppe dure des graines, le taux de germination n’augmente pas.

Trois caractéristiques originales retiennent l’attention. L’optimum de germination se situe entre 5 et 15°C. L’émergence est très lente et progressive au sein d’un groupe de graines issues d’un même pied ; et enfin, la germination des graines s’échelonne bien sur deux ans si elles sont enfouies comme l’avait donc observé Théophraste.

Ces caractères peuvent s’interpréter comme autant d’adaptations au climat méditerranéen et à une germination en cours d’hiver, la période où d’abondantes précipitations peuvent permettre la croissance des plantules fraîchement nées. Mais comme ces pluies restent imprévisibles en intensité et peuvent même manquer, l’échelonnement dans le temps évite de « mettre tous les œufs dans le même panier » et de garder en réserve des graines pour l’année suivante, qui sera peut-être meilleure.

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Graines de muscari à toupet.

BIBLIOGRAPHIE

  1. Ecophysiology of seed germination in Mediterranean geophytes. 1. Muscari spp. Maria A. Doussi and Costas A. Thanos. Seed Science Research (2002) 12, 193–201

A retrouver dans nos ouvrages

Retrouvez le muscari à toupet
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