Podarcis muralis

Tout le monde connaît cette faculté des lézards, dont le lézard des murailles, à casser leur queue au niveau d’une des vertèbres quand on cherche à les saisir par leur appendice caudal (ou des prédateurs, en tête desquels se trouve le chat domestique !) ; on appelle autotomie cette étonnante capacité. Le morceau de queue détaché se tord sur place par réflexe ce qui peut en plus détourner l’attention du prédateur surpris et laisse le temps au lézard de s’enfuir sauf.

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Lézard des murailles qui vient de perdre sa queue.

Ensuite, lentement, la queue « repousse » : elle se régénère mais la nouvelle queue reste plus courte que l’originale (9cm en moyenne contre 13cm pour une queue d’origine). Un lézard à la queue régénérée se reconnaît de loin à l’aspect plus court et trapu de la « nouvelle » queue et sa coloration différente.

Il existe entre les vertèbres des zones cartilagineuses moins résistantes qui cèdent sous la brusque contraction réflexe de muscles de la queue ; il n’y a pas de saignement car artère et veine caudales se ferment automatiquement.

Des chercheurs américains (1) ont fait subir à des lézards des murailles (espèce naturalisée et commune aux U.S.A.) des séries de tests de « sprints » forcés sur terre ou dans un arbre, d’abord avec leur queue d’origine (intacte ou régénérée après une autotomie ancienne) et juste après les avoir amputés de celle-ci afin d’évaluer l’impact de la perte sur leur capacité à fuir en cas d’attaque de prédateur. La population étudiée présentait une fréquence de queues régénérées de 40 à 60% compte tenu de la pression de prédation des chats en milieu urbain.

Sur terre ou dans les arbres, là est la différence

Le fait de couper la queue augmente nettement les performances de capacité d’accélération et de distance parcourue sur terre (à l’horizontale) mais les diminue fortement en situation arboricole (à la verticale) et ce que la queue originelle soit intacte ou régénérée. Cette amélioration des performances sur terre, après suppression de la queue, contredit l’idée que la queue servirait de contre balance au poids du corps et porterait le centre de gravité vers les pattes arrière, permettant ainsi une meilleure accélération initiale.

Avant l’intervention consistant donc à couper la queue, les individus à queue intacte (longue et fine) se montrent plus rapides en déplacement vertical dans les arbres. Ils utilisent effectivement leur queue pour l’enrouler autour des brindilles pour mieux s’équilibrer quand ils progressent sur un support mouvant. Par contre, après l’intervention de section de la queue, les individus qui avaient auparavant une queue régénérée (courte) deviennent capables d’escalader un support arboricole plus vite et sur une plus grande distance. Il semblerait donc que les lézards ayant déjà subi une autotomie ont appris par expérience à compenser le manque brutal de queue, même longtemps après que la queue se soit régénérée. Autrement dit, avoir une queue régénérée pourrait procurer un avantage adaptatif en situation de fuite face à un prédateur ou, au contraire, dans le cas où l’animal pratique la poursuite des proies à vue, un avantage pour se nourrir.

En tout cas, cette étude montre l’importance de la queue dans la locomotion du lézard des murailles et que le recours à l’autotomie en cas de pression de prédation anormalement élevée (comme en milieu urbain à cause des chats par exemple) peut modifier les comportements et affecter les forces de sélection.

BIBLIOGRAPHIE

  1. Effect of caudal autotomy on locomotor performance of wall lizards (Podarcis muralis). R.M. Brown ; D. H. Taylor ; D. H. Gist. Journal of herpetology ; 1995.

A retrouver dans nos ouvrages

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