Philodromus

Cette chronique est dédiée à la biodiversité de la commune où je réside, Saint-Myon en Limagne auvergnate. Vous pouvez retrouver toutes les chroniques sur la nature à Saint-Myon en cliquant ici

Pas facile à voir de loin … et même de près !

Sur les troncs des noyers dans la plaine, en 2008, j’ai observé à plusieurs reprises une belle araignée surprenante par sa capacité à « imiter » l’écorce des noyers au milieu des lichens et des fissures. Je ne l’ai identifiée de manière certaine (mais incomplète !) que très récemment grâce à l’aide d’un expert régional, un arachnologue, B. Derepas. En effet, l’identification des espèces d’araignées est une tâche très complexe dans la majorité des cas à cause du grand nombre d’espèces (plus d’un millier en France) et de leurs fortes ressemblances entre elles. 

Voyons un peu les critères qui permettent de l’identifier. Elle appartient à la famille des Philodromidés qui regroupe des espèces reconnaissables à leur corps élancé, leur tête-thorax presque ronde et couverte de poils plumeux, leurs longues pattes toutes égales ou presque, leurs yeux tous sombres, petits et de taille égale et leur abdomen pointu au bout. Elles ressemblent un peu aux araignées-crabes ou thomises mais ne se déplacent que rarement de côté comme ces dernières.

Noter que la seconde paire de pattes est légèrement plus grande que les trois autres ce qui est un critère pour reconnaitre les Philodromes

Dans cette famille, il y a plusieurs genres et celle-ci se range dans le genre philodrome (Philodromus en latin scientifique). Philodrome signifie mot-à-mot : qui aime (philo) courir (dromos = la course) ; effectivement, si on la dérange, elle se met à courir très vite, changeant brusquement de direction. Même pour chasser, elle se déplace en courant et en faisant de brefs affûts : dès qu’une proie est en vue, sans attendre que celle-ci passe juste devant elle, elle se rue dessus et la mord avec ses crochets à venin ou chélicères. Elle ne tisse pas de toile mais fabrique quand même un fil de soie au bout de son abdomen qui lui sert de « corde de rappel » ! 

Enfin, au sein du genre philodrome, on distingue une bonne dizaine d’espèces. Ses pattes avec des grandes taches grises ou noires, son corps assez aplati et son aspect très mimétique pointent vers une espèce, la philodrome perlée. Mais comme il existe au moins deux autres espèces très proches, on ne peut l’identifier avec certitude avec les seules photos que j’en ai faites ; il faudrait l’examiner sous une loupe à fort grossissement et avec des yeux d’expert pour identifier précisément l’espèce ! Le verdict de Brice l’expert, que je remercie, est donc : Philodromus sp. (sp. pour espèce non identifiée) du groupe margaritatus !  

En plus, comme elle est capable de changer de coloration selon la couleur de fond de son environnement, son aspect varie beaucoup : elle peut être très claire, ou verdâtre ou grisâtre et, pour ne rien arranger, les mâles sont différents des femelles ! L’étude de la biodiversité n’est pas simple au moins pour des groupes comme les araignées ! 

Je ne l’ai pas revue depuis mais je ne l’ai pas trop cherchée non plus ; donc ce printemps 2020 je vais le rechercher de nouveau en mai-juin. Vous-même, en vous promenant, examinez de près les troncs des vieux noyers et vous aurez peut-être la chance de voir la belle : prévenez moi alors ! 

G Guillot. Zoom-nature.