Une tête de croquemitaine
Lamium amplexicaule
Cette chronique est dédiée à la biodiversité de la commune où je réside, Saint-Myon en Limagne auvergnate et sur la commune voisine d’Artonne. Vous pouvez retrouver toutes les chroniques sur la nature à Saint-Myon en cliquant ici.
Le lamier à feuilles embrassantes est une espèce commune dans ou au bord des cultures, dans des lieux sec et chauds. On le retrouve régulièrement perché sur les vieux murs à la faveur de zones dégradées ou de fissures. Il fleurit une bonne partie de l’année.
Quiconque prend le temps de regarder ses fleurs de près n’est pas prêt de les oublier : groupées en étages compacts, elles affichent une belle coloration rose ou rouge sang avec un casque velu et une lèvre inférieure claire ponctuée de points rouge foncé. De face, on dirait une gueule ouverte qui pousse un cri révélant son gosier profond ; cette analogie a d’ailleurs suscité le nom de lamiers (il en existe d’autres espèces communes comme le lamier blanc) : dans la mythologie grecque, les Lamies étaient des sortes de vampires qui suçaient le sang des jeunes gens ; Lamia était une croquemitaine femelle qui venait voler les enfants mais aussi le nom d’une jeune mère qui, ayant perdu plusieurs bébés à cause d’une déesse jalouse, était devenue ogresse par désespoir et dévorait les enfants des autres. Bref, un contexte effrayant pour une bien jolie fleur !
De profil, on note que la fleur possède en arrière un long tube floral droit au fond duquel se trouve le nectar accessible seulement aux insectes à longue trompe ou langue. En fait, ce lamier produit deux types de fleurs : celles, décrites ci-dessus fertiles et d’autres stériles, fermées d’un rouge intense, restant au stade de bouton floral et qui s’autopollinisent sans s’ouvrir. Elles assurent la garantie de produire à minima des graines si jamais la météo est défavorable aux insectes pollinisateurs.
Il possède une autre caractéristique peu commune : les feuilles supérieures opposées se touchent et « s’embrassent » si bien que la tige fleurie semble passer au milieu. Chacune de ces feuilles porte environ cinq dents marquées qui lui valent, en anglais, le surnom de « mordue par les poules » (henbit), comme si des coups de bec avaient entamé ses feuilles.
G Guillot. Zoom-nature.