Cette chronique concerne l’une des fermes auvergnate gérée par le mouvement Terre de Liens dont les objectifs sont d’enrayer la disparition des terres agricoles, alléger le parcours des agriculteurs qui cherchent à s’installer, et développer l’agriculture biologique et paysanne.

21/01/2020 Je parcours les terres de la ferme des Raux (Gerzat  63) pour faire quelques photos et j’arrive devant une vaste éteule de maïs, plantée d’alignements de jeunes arbres (parcelle en agroforesterie : voir la chronique) ; au premier regard, je repère qu’il y a « du monde » au sol : je parle des plantes adventices, les mauvaises herbes des cultures. D’habitude, dans une éteule de maïs conventionnelle, si vous trouvez dix espèces c’est le bout du monde mais ici, sur cette ferme gérée en bio, je vais en recenser au minimum 29 : un vrai bonheur pour le malherbologue (c’est le nom officiel des spécialistes des mauvaises herbes !) qui reprend espoir devant une telle profusion. 

Liste des espèces d’adventices rencontrées dans cette éteule de maïs

Quelques espèces dominent : les rosettes des chardons aux ânes abondent mais uniquement dans la partie terminale de la parcelle proche du chemin ; sinon, les rosettes de grand coquelicot pullulent tout comme le mouron des oiseaux qui forme de grandes plaques, la laitue scarole (des milliers de rosettes), le laiteron âpre aux rosettes bleutées ou la bourse-à-pasteur. 

Plus localisées, par taches dispersées parfois denses : le cirse des champs, la mauve à feuilles rondes, la véronique de Perse et le lamier pourpre. Détail intéressant pour ces deux dernières espèces : un certain nombre de pieds sont fleuris. Or, parfois même au cœur de l’hiver, par temps doux, on a désormais avec la crise climatique, des abeilles et surtout des reines de bourdons qui sortent de leur hibernation et circulent ; trouver alors quelques fleurs à butiner peut les aider à survivre et compenser les pertes énergétiques liées à ces vols souvent sans lendemain. 

Et puis, il y a quelques surprises inattendues. De nombreuses rosettes de pieds d’alouette m’interpellent : s’agit-il de l’espèce liée aux moissons et devenue rare ou de l’espèce cultivée introduite et parfois semée en jachères (pied d’alouette d’Ajax) ; à revoir ce printemps ! Des feuilles finement découpées d’un vert cendré reviennent çà et là : on dirait de la phacélie, cette plante mellifère semée dans les jachères pour les abeilles, mais ce n’est pas çà ; et puis, presque au moment de quitter la parcelle, je tombe sur un pied bien développé et fleuri : plus de doute, il s’agit d’une plante devenue peu commune et localisée en Limagne, le sisymbre sagesse ou sagesse des chirurgiens (ou encore herbe de Sainte Sophie) ; belle surprise ! Enfin je croise trois jeunes pieds de panais sauvage. 

Toute cette diversité signifie que le sol contient une réserve de graines très garnie (les botanistes parlent de banque de graines), une manne pour les carabes des champs qui participent à la régulation des adventices (voir la chronique sur ces insectes dans la partie scientifique du site) et pour les passereaux granivores qui se regroupent en bandes l’hiver pour exploiter cette ressource : bruants, linottes, serins cinis, alouettes des champs, … D’ailleurs, nous consacrons une autre chronique à ces dernières car elles étaient présentes en nombre au milieu de cette éteule. 

G. Guillot. Zoom-nature. 

Bibliographie 

https://terredeliens.org/auvergne.html