Cette chronique regroupe toutes les Brèves quotidiennes (sauf le week-end) publiées pour la première moitié de Février sur mon compte FaceBook, dédié à Zoom-nature, accessible au Public :  Brèves de nature.

 Ce sont des mini-chroniques quotidiennes à partir de photos prises au cours de mes balades et qui traitent de la biodiversité très ordinaire. Quand le sujet évoqué est traité sur mon site, j’ajoute un lien vers une chronique.

15/02 C’est un fameux trois-mâts !

Quand un arbre est couché à l’horizontale par un coup de vent sans être déraciné, il peut rester en vie. S’il est assez vigoureux, cette position va stimuler des bourgeons dormants sous son écorce. Ils produisent des rejets verticaux qui grandissent progressivement les uns après les autres en allant vers la pointe qui, elle, parfois réussit à se redresser un peu. Ainsi, se forment de nouveaux troncs verticaux qui se ramifient et portent des feuilles. L’arbre retrouve sa verticalité sous forme de bébés-arbres « plantés » sur le tronc mère. On appelle réitération ce « super-pouvoir » des arbres (voir la chronique).

On l’observe surtout sur des feuillus (chênes, saules, noisetiers, …) mais beaucoup plus rarement, comme ici, sur des résineux : ce sapin, dans un vallon frais, est ainsi devenu un bateau trois-mâts, la proue fièrement dressée !

16/02 Moquettes et fumées

Une lectrice m’a soumis la photo 1 : dans une clairière, un amas de crottes noires, luisantes (fraîches), ovales, avec un bout pointu et l’autre arrondi ? A priori, il s’agit d’un Chevreuil : on appelle ces petits tas qu’il-elle dépose des moquettes !

La taille permet de ne pas les confondre avec celles son grand cousin le Cerf élaphe : 1 à 1,5cm chez le Chevreuil versus 2,5cm chez le Cerf ; dans son cas, on parle de fumées ! Attention : on appelle souvent « biche » la femelle du Chevreuil ; il vaut mieux dire chevrette pour éviter la confusion.

Je profite de cet exemple pour inciter celles-ceux qui se posent des questions sur des observations à me les soumettre via le mel de mon site zoom-nature : bonjour@zoom-nature.fr

Si l’exemple s’y prête, je le publierai sous forme de Brève comme ici. Merci à Sylvie (de la Montagne de Lure) pour sa photo.

18/02/ Infos Dimanche : les lichens

Vous êtes peut-être comme moi : les lichens vous intéressent beaucoup et vous adorez les photographier … mais vous êtes rebutés quand il s’agit de les identifier. La plupart des guides disponibles sont très techniques : c’est normal car il y a beaucoup d’espèces très proches et très variables d’apparence.

Alors, si vous voulez vous « lancer dans les lichens », je vous propose le site Lichens Go : site de sciences participatives visant à évaluer la qualité de l’air. Découvrez ce programme très intéressant : vous pouvez rejoindre une équipe locale. Et vous trouverez un guide d’identification simplifié très bien fait : un guide « pour les Nuls » … que vous cesserez d’être (comme moi) si vous vous y plongez ! Le lien vers le site Lichens go.  Le lien vers le guide d’identification téléchargeable :

19/02 La coupe des elfes

Impossible de rater et de confondre ce champignon : la pezize écarlate. Elle apparaît le plus souvent en petites colonies de coupes charnues, très serrées, rouge vif à l’intérieur. D’où leur surnom anglais de coupe des elfes ! Cette couleur est due à des pigments caroténoïdes qui absorberaient les rayons du soleil pour réchauffer l’intérieur et favoriser la maturation des spores !

Elles poussent sur des branches mortes à demi enfouies dans le sol dans des sites très humides, généralement au milieu de débris et de feuilles mortes.

Sous ce nom de pézize écarlate se cachent trois espèces différentes très proches, différenciables uniquement avec le microscope (pour experts !). On parle d’espèces jumelles ; chacune semble avoir des préférences par apport aux essences sur les branches desquelles elles poussent : une vit sur hêtre, orme ou noisetier ; une de préférence sur tilleul ; et une autre sur aulne, érable, saule et robinier !

20/02 Les saigneurs des anneaux

Ce jeu de mots (douteux ?) m’a servi de titre à une chronique publiée au printemps 2022. Je venais de découvrir un type de trace animale sur des arbres : des séries de trous alignés, en anneaux successifs, parfois sur plusieurs mètres de hauteur, le long de troncs ou de grosses branches. Ce ne sont pas des trous de sortie d’insectes mangeurs de bois (xylophages) : trop alignés et réguliers !

Ils ont été forés par des pics (épeiche et mar), au début du printemps, pour provoquer un écoulement de sève (alors en pleine reprise de circulation) qu’ils lèchent avec leur longue langue. Très nutritif ! Ils reviennent apparemment année après année et percent de nouveaux trous ou réactivent les anciens.

Je croyais alors que c’était très rare ; mais, j’ai constaté qu’une essence était particulièrement appréciée : les tilleuls. Et depuis, dès que je me trouve devant un tilleul dans la nature, j’explore à la jumelle les branches et très souvent j’en observe ! 

21/02 Deux gros mots : indument et tomentum

Tant que la végétation reste clairsemée, c’est le moment d’observer les rosettes de feuilles des bisannuelles qui ont passé l’hiver et s‘apprêtent à produire tiges, feuilles et fleurs pour le grand feu d’artifice printanier et estival. Nombre d’entre elles se protègent du froid en développant un revêtement de poils : un indument (pas d’accent circonflexe ! dérivé du latin indumentum, vêtement).

Chez certaines, cet indument prend la forme d’un tapis dense de poils mous, serrés, entremêlés, cachant la surface des feuilles. On parle de tomentum (mot latin signifiant rembourrage), qui donne l’adjectif tomenteux.

En voici deux exemples typiques très communs partout : les rosettes du chardon aux ânes ou onopordon et celles des molènes ou bouillon-blanc.

22/02 Micro-forêt de plantules ailées !

Dans les années 70, sur des pentes granitiques des côtes de Limagne (63), on a planté des cèdres de l’Atlas. Devenus adultes, les cèdres produisent chaque année des cônes. Quand ceux-ci se désarticulent, les graines s’en échappent et dérivent avec le vent car elles portent une large aile triangulaire rousse ; elles sont ainsi dispersées plus ou moins loin de l’arbre mère.

Hier, sur un talus sableux en bordure d’une cédraie, j’ai découvert des centaines de ces graines en pleine germination. De la pointe de la graine est sortie la radicule qui s’est enfoncée et une tigelle surmontée d’un étage d’aiguilles vertes (cotylédons) a grandi. L’enveloppe de la graine et son aile se retrouvent dressées au-dessus, telles un drapeau ! Elles tomberont quand les cotylédons vont se déployer.

Au final seules quelques plantules (sur des milliers) seulement finiront par devenir un jeune cèdre ! Retrouvez la dispersion des fruits/graines par le vent dans cette chronique.

23/02 Une coccinelle mycophage

Sous les feuilles d’un lierre, deux jolies coccinelles d’un bel orange en semi-hibernation. Plutôt de forme ovale que ronde, assez grande (pour une coccinelle ; 5-6mm), elle se reconnaît à ses yeux noirs, son thorax orange taché de jaune et un rebord transparent qui borde les élytres (ailes durcies sur le dos). Sur celles-ci, on peut compter huit belles taches blanchâtres d’où son nom commun de Coccinelle à 16 taches (2 x 8 !) et son nom latin Halyzia sedecimguttata (guttata = goutte = tache ; sedecim = 16 !).

Assez commune en milieu forestier, elle se nourrit surtout du mildiou poudreux qui recouvre les feuilles de certains arbres : on la qualifie donc de mycophage (myco = champignon) ; au passage, elle consomme aussi quelques pucerons qui s’y trouvent.

Voir la chronique sur les régimes alimentaires des coccinelles : toutes les espèces ne se nourrissent pas que de pucerons !

26/02 Question de couleurs

Aurélie B., amie sur B.de N., pose cette question : pourquoi y a-t-il des violettes blanches qu’on appelle quand même « violettes » ?

Précisons d’abord qu’il existe 22 espèces différentes de violettes en France ! Une des plus communes fleurit très tôt au printemps (cette année dès début février !) : la violette odorante, celle des chemins et prés, très parfumée. Mais, il y a d’autres espèces communes comme la violette hérissée (plus tardive, violet clair et sans odeur).

Effectivement, la violette odorante, dont on cueille volontiers de petits bouquets, peut avoir, selon les pieds, des fleurs blanches ou des fleurs d’un bleu violet foncé (et même des intermédiaires rosées). Ce sont deux formes colorées « génétiques » de la même espèce : on les appelle donc du même nom violette ! Selon les lieux, l’une ou l’autre forme domine sans qu’on sache trop pourquoi. Elles sont très appréciées des reines bourdons sorties d’hibernation.

27/02 La forge de la sittelle

Sur l’écorce crevassée du tronc d’un gros peuplier, un détail insolite accroche le regard : deux noisettes coincées dans une crevasse et ouvertes, vides de leur graine. En s’approchant, on voit que la noisette a été « défoncée » sans être grignotée (pas de traces de dents) : l’œuvre d’une sittelle torchepot, ce passereau grimpeur doté d’un « bec de pic ».
Elle récolte les noisettes et vient les loger dans une crevasse : une fois bien calée, elle lui assène de puissants coups de bec (martelage) jusqu’à la fendre en deux et ainsi accéder à la graine nutritive ! On parle de forge pour désigner l’écorce servant d’appui : on n’est presque au stade de l’usage d’un outil !
Découvrez dans cette chronique les autres talents de la sittelle dans la construction de son nid : maçonnage de l’entrée avec de la boue (« torchepot ») et habillage du fond de la cavité avec des écorces.

28/02 Noires frontières de combats invisibles

Sur un tronc de hêtre coupé, des lignes noires formant des motifs imprévisibles ; elles sont dues à des champignons « mangeurs de bois » comme les corioles versicolores. Ils colonisent le bois mort par leur réseau de filaments (mycélium) qui se faufilent entre les cellules du bois qu’ils décomposent.

Un tronc ou une branche peut être colonisé par des espèces différentes ou par différents individus d’une même espèce. Quand leurs mycéliums en expansion se rencontrent, ils « s’affrontent » en secrétant des substances chimiques qui transforment certains composés du bois en un pigment noir, la mélanine. D’où ces lignes de combat qui parcourent le bois complètement investi par de nombreux mycéliums invisibles à notre œil … On parle de lignes de démarcation.

Sur un arbre vivant infecté, elles se forment aussi entre mycéliums et parties non infectées du bois qui se défendent !

Voir l’exemple de l’amadouvier, un des champignons responsables de ces lignes

29/02 Les dents de la rivière

Sur la rivière Allier (63), le Castor est désormais une espèce prospère et nous donne à voir les traces imposantes de son inlassable activité de bûcheron/écorceur d’arbres à bois tendre comme frênes, noisetiers et surtout saules et peupliers.

Contrairement à une fausse idée répandue, le Castor ne se nourrit pas de bois proprement dit (indigeste et très peu nutritif) mais d’écorce et de l’aubier externe. Il complète beaucoup à la belle saison avec diverses plantes herbacées.

S’il abat des arbres assez gros avec la fameuse « taille en crayon » c’est pour accéder à leur écorce nutritive. On reste pantois devant ses capacités de bûcheron avec ses seules dents : la taille des copeaux laissés atteste de sa puissance. Il peut aussi arracher directement l’écorce de gros arbres où il laisse des traces de ses coups de dent.

Découvrez les secrets anatomiques du castor qui lui permettent de tels exploits sans égal.